Fervent défenseur du vintage, je n’ai eu cesse de vanter ici les apports de ce dernier dans l’industrie horlogère contemporaine. Car il existe bien une relation étroite entre les montres vintage et les montres modernes. Le vintage cristallise l’ADN d’une marque dans le temps, cet ADN même qui lui permet de se différencier des autres. Pourtant la place que réservent ces manufactures à la restauration des pièces historiques fait souvent l’objet de débats dans le milieu des collectionneurs.
Les mauvaises expériences sont nombreuses et on ne compte plus les pièces de valeur qui ont été définitivement défigurées suite à un passage dans les ateliers d’horlogerie «modernes». Pire, au-delà de l’aspect esthétique, c’est tout un pan de l’histoire d’une marque que l’on détruit. Et si l’on ne prend pas garde, c’est tout le patrimoine d’une industrie qui s’effacera irrémédiablement.
Les choses évoluent, mais la tendance était jusqu’à peu encore, celle de privilégier la fiabilité au détriment du respect de l’intégrité d’une pièce historique. Depuis peu, on observe cependant une prise de conscience des marques qui prennent de plus en plus le sujet au sérieux.
Lors de notre récente visite chez Blancpain, j’y ai découvert peut-être ce qui se fait de mieux en la matière. Cette manufacture de 300 ans qui reste très discrète sur son atelier vintage, a su poser les jalons de ce que qui pourrait être les règles de l’art dans le service et la réparation des montres de collection.
Sans trop entrer dans les détails, voici quelques points d’importance que j’ai pu relever et que j’illustre ici avec des photos extraites d’un rapport d’analyse que l’atelier vintage de Blancpain remet à ses clients.
Car avant de prendre la délicate décision de se lancer dans une restauration, le client est en droit de comprendre le processus dans lequel il s’engage.
Etape préalable et indispensable à toute décision, ce document l’informe en premier lieu sur l’authenticité de son garde temps. La montre y est intégralement démontée, chaque pièce identifiée, évaluée et commentée pour apporter le maximum d’informations à son propriétaire. L’horloger liste ensuite les pièces défectueuses, à remplacer ou à décontaminer, le rapport d’analyse identifie aussi les pièces « de services » ou non conformes au cahier des charges de l’époque.
Un diagnostic est ensuite clairement posé, photos et illustrations à l’appui, le client visualise les défauts et les risques dans le détail. Une liste d’actions correctives est alors proposée, chaque opération est expliquée point par point et le temps passé y est estimé.
Chose importante et non des moindres, les actions critiques telles que l’avivage de la boite ou la décontamination du radium et la restauration des aiguilles sont proposés au client, UNIQUEMENT en option. Ces opérations ont des conséquences irréversibles sur l’aspect et la valeur de la montre, le client doit prendre sa décision en connaissance de cause.
Toutes ces opérations se font en amont de la restauration d’une montre, elles sont les garantes d’une parfaite transparence dans la relation de confiance qui se lie entre le collectionneur et l’horloger qui va prendre en charge sa montre.
Le respect de l’intégrité historique et mécanique de la montre est la préoccupation centrale de tout collectionneur. Les risques de compromettre cette intégrité doivent être connus, évalués et discutés. Quelles pièces doivent être remplacées et quelles pièces peuvent être conservées ? Privilégier l’aspect historique mais aussi connaitre les risques sanitaires en cas de non décontamination du radium. Autant de questions qui sont rarement évoquées lorsque vous rapportez votre garde-temps de plus de 50 ans chez votre distributeur habituel.
Voir, comprendre et apprendre : l’échange se fait aussi dans les deux sens. Une marque apprend elle même sur sa propre histoire lorsqu’une de ses montres revient à l’atelier après des décennies de loyaux services. Reconstruire ses archives, reconstituer un stock de pièces détachées, apprendre sur sa propre histoire … Cela n’a pas été la priorité de l’industrie horlogère pendant longtemps.
Richard Valence
Pour avoir eu une très mauvaise surprise avec une Submariner 5513 que j’avais achetée neuve en 1966 et qui était certes dans un état conséquent, je ne peux qu’approuver la démarche de Blancpain: certes on me l’a rendue superbe, mais bracelet, cadran, lunette et aiguilles changés. A l’interieur aussi sans doute. Difficile de reconnaître ma 5513,sauf par les papiers et le numéro.
Mathieu
Oui gros problème chez Rolex, sans compter le très grosse perte de valeur de votre montre après la restauration…
Pallud François
Encore un article très intéressant,merci Simon